To Telema Mpo Na Kongo

To Telema Mpo Na Kongo

UNE COURTE NOTE SUR LES BANYAMULENGE

Cette "note" a été publié dans les pages virtuelles de l'Obsac en mars 2000 par Wise Ken. Ce sont de larges extraits de ce dernier qui sont repris sans référence à la source par Charles Onana dans son livre sur Kagame (voir notre critique dans l'article intitulé : Le plagiat d'Onana)

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1) QUI SONT-ILS ?

Selon diverses sources historiques les premiers groupes ancestraux des Banyamulenge sont arrivés il y a 200 ans dans la région qui deviendra plus tard le Congo belge, puis le Zaïre et finallement la RD Congo. Le groupe s'est constitué à partir de quatre groupes d'origine :
un premier groupe originaire du Royaume du Rwanda
un deuxième en provenance du Burundi
un troisième de Tanzanie et,
un quatrième groupe composé d'esclaves issus de tribus locales (Bashi, Bafulero et Batetela) qui ont progressivement été incorporés comme membres à part entière.

Les Banyamulenge habitent la province du Sud-Kivu et, en1996, à la veille de la première guerre congolaise, leur nombre était estimé à 400.000 personnes. Comme on peut en déduire de leur origine diverse les Banyamulenge ne sont pas tous d'origine tutsie, même si une majorité affirme avoir des ancêtres dans ce groupe ethnique. De plus, culturellement parlant, la division entre les concepts ethniques de «Tutsi» et de «Hutu» n'a pas parmi eux la même signification qu'au Rwanda et au Burundi. En fait les Banyamulenge centre leur identité sur les concepts identitaires de «Banyamulenge» et de «Congolais», plutôt que sur celui de «Tutsi».

2) QUELS ONT ÉTÉ LEURS PRINCIPAUX PROBLÈMES EN RDC?
a) SOUS LE RÉGIME DE MOBUTU

Au cours des deux dernières décennies du régime Mobutu, les Banyamulenge ont été la cible de discrimination ethnique systématique :

en dépit du fait que les Banyamulenge étaient reconnus historiquement comme une des tribus natives du Congo (c'est-à-dire comme un des groupes établis sur le territoire congolais avant 1885), ils se sont vus nier leur droits civiques, comme celui d'être élu au parlement, d'être ministre, etc. et, au début de 1996 on leur a arraché leur citoyenneté congolaise et le régime Mobutu décida de les exulser vers des pays étrangers, spécifiquement le Burundi et le Rwanda. C'est ce qui explique qu'en août 1996 un groupe de jeunes banyamulenge (dont certains reçurent une formation militaire au Rwanda, alors que les autres désertèrent d'unités militaires zaïroises) prirent les armes pour combattre contre le régime Mobutu. Deux mois plus tard ils furent rejoints par Laurent-Désiré Kabila qui, en mai 1997 devint le nouveau président du Congo après la défaite des troupes de Mobutu.

Au cours de cette première guerre, les Banyamulenge ont été appuyés par les troupes rwandaises pour deux raisons principales :

Certains Banyamulenge avaient combattus avec le Front patriotique rwandais, contribuant à sa prise du pouvoir à Kigali en 1994; et

Au lendemain de sa victoire l'APR se trouva entraînée dans une poursuite des combats contre les restes génocidaires de l'armée rwandaise (ex-FAR) et de la milice Interahamwe qui lançaient des attaques à partir du territoire congolais, depuis les provinces du nord et du Sud-Kivu.
 
b) SOUS LE RÉGIME KABILA

On devrait garder à l'esprit que malgré de sérieuses réserves exprimés par les Banyamulenge, Laurent-Désiré Kabila fut placé à la tête de la rébellion par l'Ouganda et le Rwanda. Le groupe n'avait en effet pas oublié les crimes commis contre les Banyamulenge au cours de la rébellion muléliste des années 1960. Une fois au pouvoir en mai 1997, Kabila nomme des officiers rwandais à des postes de commandement stratégique au sein des forces armées congolaises (FAC) : le colonel rwandais James Kabarebe devint le chef d'état-major des FAC (poste qu'il occupe de mai 1997 à juillet 1998). Les officiers banyamulenge qui avaient pourtant joués un rôle clé au cours de la campagne militaire des différents pays de la région contre le régime Mobutu, ne seront pas promus à cause de l'agenda secret du Rwanda en RDC. À l'époque, à cause des positions stratégiques qu'ils détiennenent dans l'appareil militaire congolais, les Rwandais estiment qu'ils leur sera possible de manipuler le régime Kabila pendant longtemps. Le gouvernement Rwandais est pleinement conscient que les Banyamulenge, tant les militaires au sein de l'armée congolaise que les dirigeants politiques du groupe, sont opposés à cette politique de manipulation occulte. Cette opposition au contrôle de fait exercé par le Rwanda sur une partie de l'appareil d'État congolais, explique pourquoi aucun officier banyamulenge ne fut promu au sein des FAC entre le mois de mai 1997 et le mois d'août 1998.

En juillet 1998, alors que Laurent-Désiré Kabila, avec l'appui d'alliés au sein de la SADC, auquel le Congo s'est joint peu après la défaite du régime Mobutu, tente de prendre le contrôle total le l'appareil d'État, on assiste à une détérioration rapide des rapports entre le régime congolais et les Rwandais. Les troupes rwandaises se voient finalement signifier un ordre d'expulsion du Congo. Lorsque la deuxième guerre éclatera finalement en août 1998, la principale cible de l'armée congolaise sur l'ensemble du territoire nationale fut (et demeure jusqu'à ce jour) les Banyamulenge (civils et militaires confondus). Kabila et certains de ses ministres, dont Yerodia Ndombase) iront jusqu'à inciter le peuple congolais à tuer tous les Tutsis (Banyamulenge et autres Tutsis). Subséquemment, des milliers de personnes assimilées à un groupe ethnique sur la base de leur facies furent tuées ou emprisonnées. Dans certains cas cela mènera au meurtre de personnes qui n'avaient strictement rien à voir avec les Banyamulenge ou les Tusis (rwandais ou congolais), comme des Peuls et des Djoula d'Afrique de l'ouest ou des Somaliens, dont le seul crime fut d'avoir été présent à Kinshasa au moment de ces événements.
 
3) LE DIFFÉREND ENTRE LES BANYAMULENGE ET LES RWANDAIS SUR LA QUESTION CONGOLAISE
Le premier différend entre les Banyamulenge les Rwandais remonte à décembre 1996 lorsque l'APR, sous prétexte de «raisons de sécurité», planifie le déplacement de l'ensemble de la population banyamulenge du Sud-Kivu vers le Rwanda. Pour certains Banyamulenge ceci équivaut à une «déportation» forcée et sera opposée par de nombreux officiers banyamulenge qui seront arrêtés et emprisonnés au Rwanda pendant 9 mois sans autre forme de procès. Parallèlement, les dirigeants politiques banyamulenge qui s'opposeront à ce plan seront purgés des structures politiques de l'AFDL (entre autres Müller Ruhimbika). Ceux qui sont proches de Kabila seront les seuls qui accepteront d'être manipulés par les Rwandais. À l'heure actuelle, c'est également le cas de ceux qui détiennent des postes au sein du RCD-Goma.

En fait, lorsqu'éclate la deuxième guerre congolaise en août 1998, des dirigeants banyamulenge, auxquels se joignent d'autres Congolais, décident de la création d'un parti politique complètement indépendant du Rwandan et de tout autre pays étranger. Le FRF (Forces républicaine et fédéralistes) fut malheureusement rapidement saboté par les services de renseignement rwandais et ses dirigeants forcés à s'exiler en Europe. Mais le parti jouit encore d'appuis très importants parmi la population, particulièrement dans la province du Sud-Kivu où les rebelles du RCD-Goma eux, n'ont aucun appui auprès de cette dernière. Tous les efforts en faveur d'une réconciliation par les dirigeants des différents groupes ethniques du Sud-Kivu, et d'autres régions dans l'est de la RDC, ont été systématiquement sabotés par les militaires rwandais basés dans cette région du Congo, ainsi que par le régime Kabila.

En résumé, les Banyamulenge sont opposés à la politique du gouvernement rwandais qui consiste en RDC à dominer le peuple congolais et à piller ses ressources naturelles (minières et forestières). Cette position s'applique aussi aux autres pays, comme l'Angola, l'Uganda et le Zimbabwe qui ont, dans les faits, la même politique que le Rwanda. Les Banyamulenge et tous les autres groupes ethniques de la RDC qui ont directement fait les frais de la réalité de la politique étrangère de ces pays dans les teritoires occupés, dans l'est et le nord du pays, ou dans les régions minières du Katanga et Kasaï - où les alliés de Kinshasa ont obtenu un accès sans limite au diamants et aux autres ressources minières - sont arrivés à la même conclusion : toutes les puissances étrangères doivent se retirer de la RDC et un processus de réconciliation nationale doit être mis en oeuvre.

La communauté internationale doit venir en appui à ce processus et un Tribunal pénal international doit être créé avec un mandat couvrant la période allant de1993 au temps présent, afin que ceux qui sont coupable de crimes contre l'humanité puissent être traduits devant la justice pour mettre fin au cycle de la violence et pour permettre aux collectivités et aux individus d'Afrique centrale de mettre cette période de souffrance et de mort derrière eux.

Wise Ken


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